Dans le sillage des Terre-Neuvas
Ils sont des centaines de milliers d’hommes qui partirent des côtes françaises à partir du début du XVIe siècle jusque vers les années 1950 pour pêcher la morue, l’or blanc, sur les bancs de Terre-Neuve et des régions avoisinantes. Embarqués sur leurs voiliers appelés les Terre-Neuviers, ces marins- pêcheurs menèrent leurs campagnes avec courage et farouche détermination. Travaillant 18 heures par jour, malmenés par les rudesses du nord de l’océan Atlantique, les Terre-Neuvas brassaient des morues par dizaines de tonnes sur les bancs de pêche de Terre Neuve, alors territoires d’abondance.
La grande pêche a aussi marqué l’histoire de Saint- Pierre et Miquelon : l’archipel a connu un essor économique important grâce à la pêche à la morue. Port de relâche et d’approvisionnement pour les terre-neuviers, le territoire français de l’Atlantique Nord habite encore la mémoire des marins et des villes qui les voyaient prendre la mer. La baie de Saint-Brieuc ne vivait-elle pas le départ de ses navires du Portrieux et de Binic dès le printemps pour ne les revoir qu’à la fin du mois d’août ? Cette route retour justement, durant laquelle les marins- pêcheurs envoyaient toute la toile pour rentrer au plus vite, sera celle empruntée par les navigateurs d’aujourd’hui. La Route des Terre-Neuvas, en parallèle du défi sportif sans précédent qu’elle propose, va permettre de faire revivre cette grande épopée maritime aux skippers mais également au grand public depuis l’hexagone et de l’autre côté de l’Atlantique.
Un parcours sportif inédit pour les Ocean Fifty
Habitués des transatlantiques entre la France et les Antilles, les Ocean
Fifty vont découvrir un parcours original et engagé. Ils relieront cette fois l’archipel de Saint-Pierre et Miquelon à la métropole, en baie de Saint-Brieuc. Une navigation d’Ouest en Est de plus de 2 000 milles, soit 6 jours de course à un rythme effréné et sans routage (les marins ne seront pas aidés par un routeur à terre, comme ils le sont sur des transats en solitaire).
Les dix équipages sont d’ores et déjà impatients et bien décidés à ajouter
à leur palmarès la toute première Route des Terre-Neuvas ! Ce parcours
en Atlantique Nord, dominé par les vents d’ouest, sera certes rapide, mais bardé de pièges. Selon le schéma météorologique le jour du départ de Saint- Pierre et Miquelon le 16 août, les marins devront appréhender le passage d’éventuelles fortes dépressions circulant au nord de l’anticyclone des Açores. Des choix s’imposeront alors pour doser le curseur entre la vitesse, la préservation du bateau et de l’équipage. L’approche de la pointe Bretagne demandera également une extrême concentration pour parer les violents courants liés aux grandes marées (coefficient 108 le jeudi 22 août à Saint-Quay-Portrieux). Il est fort à parier qu’il faudra retenir son souffle sur les derniers milles de la transat des Ocean Fifty !
Avec un niveau de jeu assez homogène au sein de la flotte, la régate devrait battre son plein jusqu’à la ligne d’arrivée en baie de Saint-Brieuc… 2 180 milles à suivre à la loupe et un retour à quai sans poisson, mais les têtes pleines d’images fortes et d’aventures humaines.